Publié le : 22 avril 2014 Source : Zenit.org
Les newsEurope : mariage entre personnes de même sexe, deux nouvelles affairesLa Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a décidé d’examiner deux affaires mettant en cause la définition hétérosexuelle du mariage en vigueur en Italie ainsi que l’absence de contrat d’union civile de la législation italienne. L’arrêt que rendra la Cour dans ces affaires aura une portée importante, au-delà de l’Italie. Le European Centre for Law and Justice (ECLJ) a été autorisé par la Cour à soumettre des observations écrites dans ces affaires, comme tierce partie. Deux cas italiens Dans la première affaire (Oliarai et autres contre Italie et Felicetti et autres contre Italie, n° 36030/11 18766/11), deux couples de même sexe se plaignent de ce que la législation italienne ne leur permette pas de se marier ou de contracter une forme d’union civile et estiment subir ainsi une discrimination en raison de leur orientation sexuelle en comparaison avec les couples hétérosexuels. Dans l’autre affaire (Francesca ORLANDI et autres contre Italie, n°s 26431/12…), six couples de même sexe se plaignent du refus des autorités italiennes de reconnaître leur mariage contracté à l’étranger, ainsi que, plus généralement, de l’impossibilité d’obtenir la reconnaissance de leur relation. Dans les deux cas, les requérants invoquent l’article 8 protégeant la vie privée et familiale et l’article 12 garantissant le droit de se marier et de fonder une famille, combinés avec l’article 14 interdisant la discrimination. La question posée par ces affaires est celle de savoir si tout couple menant, selon la Cour, une « vie familiale » doit, sans discrimination basée sur sa composition sexuelle, avoir la faculté d’obtenir une reconnaissance officielle de sa relation dès lors qu’une reconnaissance est proposée à certains couples par le mariage. Répondre positivement impliquerait que soit établie une double similitude : d’une part entre le mariage et le partenariat civil, et d’autre part entre les couples homme-femme et les relations homosexuelles. Le constat d’une discrimination obligerait les pays européens qui ne permettent pas le mariage homosexuel à proposer aux personnes entretenant une relation homosexuelle stable une forme de statut alternatif et similaire au mariage, tel que l’union civile. Concernant le « droit au mariage » Si les requêtes se limitaient à mettre en cause le caractère hétérosexuel du mariage, elles seraient manifestement mal fondées et auraient mérité d’être rejetées sans examen comme la plupart des requêtes adressées à la CEDH. Le fait que la Cour ait accepté de statuer sur ces affaires montre en soi que la Cour y voit un intérêt et une violation potentielle d’un droit garanti par la Convention. Concernant la « reconnaissance officielle » des relations homosexuelles Dans les affaires italiennes, la Cour pourrait créer une obligation générale de proposer un cadre juridique permettant aux couples homosexuels d’organiser leur vie commune et d’obtenir une reconnaissance officielle symbolique de leur mode de vie. A cette fin, elle pourrait estimer que les couples de même-sexe sont discriminés par rapport aux couples hétérosexuels dès lors qu’ils ne peuvent faire reconnaître leur relation et que l’État n’avance pas d’autre argument convaincant, lié à la sexualité, pour justifier cette impossibilité. Un tel constat obligerait alors tous les pays européens qui ne permettent pas le mariage homosexuel d’établir un statut d’union civile ouverts aux couples de même sexe. Si la Cour établit un tel droit au partenariat civil, l’étape suivante dans le déploiement des « droits LGBT » sera de rehausser les droits attachés à ce partenariat au niveau de ceux attachés au mariage. Au final, ces deux statuts se distingueront moins par les droits que par les devoirs qui demeurent plus importants dans le mariage. Telle est en tout cas la perspective dans laquelle s’inscrit la jurisprudence de la Cour, au moins depuis l’arrêt Schalk et Kopf contre Autriche de 2010 dans lequel elle établit que deux adultes homosexuels mènent une vie familiale, c’est-à-dire sont une famille comme les autres. La CEDH comme instrument d’actualisation idéologique des législations nationales Cela étant, une partie de la Cour demeure attachée à la définition de la famille établie en droit international comme « unité fondamentale de la société et milieu naturel pour la croissance et le bien-être de tous ses membres, et en particulier des enfants » [2]. Selon cette compréhension de la famille, la reconnaissance accordée au couple par la société résulte en fait de sa contribution au bien commun par la fondation d’une famille, et non pas de ses sentiments qui relèvent de sa vie privée. Selon le droit international, la famille précède et constitue la société dont émane l’État, elle ne procède pas de l’Etat qui, par son emprise sur la société, aurait le pouvoir de définir la famille. L’ECLJ, dans ses observations écrites, a répondu à chacun de ces points. L’ECLJ a également noté que le droit italien permet déjà aux couples non mariés, y compris homosexuels, d’organiser leur vie commune par la voie légale ou contractuelle. L’ECLJ a également montré que les couples de même sexe ne sont pas discriminés car ils ne sont pas dans une situation comparable aux couples homme-femme. Ils ne sont pas dans la même situation, tant d’un point de vue privé que public car les relations homosexuelles ne sont pas naturellement procréatrices, et donc susceptibles de fonder une famille. Or, l’institution du mariage vise à conférer un cadre juridique protecteur à la famille, en particulier aux enfants. Les couples homme-femme et ceux composés de personnes de même sexe ne pourraient être considérés comme similaires et comparables que si l’on confond l’identité avec l’orientation sexuelle, et si l’on estime que le mariage est indépendant de la famille. Enfin, même s’il convient d’interpréter la Convention à la lumière des conditions actuelles, ces conditions ne donnent qu’un éclairage et ne peuvent pas se substituer à la Convention comme référence principale. Autrement, la Cour se transformerait, en particulier sur les sujets de société, en instrument d’actualisation idéologique des législations nationales, ce qui l’amènerait bien au-delà de sa compétence. La Cour risque donc d’être une nouvelle fois fort divisée, à l’image de la société européenne. Dans plusieurs affaires récentes, une faible majorité de juges n’a pas hésité à imposer ses vues extrêmes sur des sujets polémiques, au prix de l’unité de la Cour et de l’esprit de retenue consensuelle qui l’animait autrefois [3]. En savoir plus sur http://www.village-justice.com/articles/Mariage-entre-personnes-meme-sexe,16724.html#ITbQVGM5Yq0GHol7.99 [1] Voir affaires Schalk et Koppf contre Autriche et S. H contre Autriche. [2] Convention internationale des droits de l’enfant. [3] voir en particulier les arrêts X et autres contre Autriche et Gross contre Suisse en matière « d’adoption homosexuelle » et de suicide assisté. Zenit.org, 2006. Tous droits réservés - Pour connaitre les modalités d´utilisation vous pouvez consulter : www.zenit.org ou contacter infosfrench@zenit.org - Pour recevoir les news de Zenit par mail vous pouvez cliquer ici |