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 - 1er juillet 2025 - Saint Thierry
Publié le : 8 juillet 2009 Source : Zenit.org
 

 

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« Caritas in Veritate et théorie du genre », par Mgr Tony Anatrella

ROME, Mercredi 8 juillet 2009 (ZENIT.org) - A l’occasion de la publication de l’Encyclique du pape Benoît XVI, Caritas in Veritate, Mgr Tony Anatrella psychanalyste et spécialiste en psychiatrie sociale, a répondu aux questions de Zenit au sujet de la notion de genre humain évoquée par l’encyclique et qui ne correspond pas à la définition du genre dans la théorie du genre qui sert de norme aux Institutions internationales et de référence pour modifier la législation dans de très nombreux pays.

Mgr Anatrella reçoit de nombreuses personnes en difficultés psychologiques et enseigne la psychologie à Paris. Il est consulteur du Conseil pontifical pour la famille et du Conseil pontifical pour la pastorale de la santé. Il vient de publier : « La tentation de Capoue - Anthropologie du mariage et de la filiation » - Éditions Cujas (Paris). Il a également publié plusieurs ouvrages qui portent sur la théorie du genre : La différence interdite aux éditions Flammarion et Le règne de Narcisse aux Presses de la Renaissance.

Zenit : Dans son encyclique Caritas in Veritate, Benoît XVI parle de « l’unité du genre humain » qui ne semble pas correspondre à la notion contenue dans la théorie du genre ?

Mgr Tony Anatrella : Évidemment, il s’agit là d’un point particulier des propos du Saint-Père. Mais on perçoit tout au long de ce document une préoccupation intellectuelle qui vise à répondre à l’argumentaire de cette théorie du genre qui devient une norme internationale et pose de très nombreux problèmes anthropologiques. Une idéologie contraire au bien de l’humanité.

Benoît XVI, dans un texte riche et dense où chaque mot est porteur de sens, affirme avec raison que l’humanité ne peut devenir elle-même qu’en se reconnaissant dans « l’unité du genre humain » pour « devenir une communauté vraiment universelle qui naît de l’appel formulé par la Parole du Dieu-Amour » (n. 34). Hommes et femmes de tous pays et toutes cultures nous appartenons à une humanité commune vécue à travers, entre autres la différence sexuelle et les différences culturelles qui exigent un véritable dialogue interculturel (n. 26) quand les traditions et les cultures ne sont pas réduites à un éclectisme culturel. Elles seraient ainsi considérées « comme substantiellement équivalentes et interchangeables entre-elles ». Le Saint-Père va encore plus loin dans son raisonnement en affirmant que l’homme ne saurait être réduit à « un donné purement culturel », comme le prétend la théorie du genre. Plus précisément, il souligne le risque de séparer la culture de la nature humaine. « Éclectisme et nivellement culturel ont en commun de séparer la culture de la nature humaine. Ainsi, les cultures ne savent plus trouver leur mesure dans une nature qui les transcende, elles finissent par réduire l’homme à un donné purement culturel. Quand cela advient, l’humanité court de nouveaux périls d’asservissement et de manipulation » (n. 26).

Autrement dit, le genre humain ne se morcelle pas mais il se rencontre et se vit à travers l’altérité qui fonde « l’ouverture à la vie qui est au centre du développement » intégral (n. 28). Une altérité qui trouve son origine dans l’altérité du Dieu trinitaire comme le souligne Benoît XVI :

« Seule la rencontre de Dieu permet de ne pas "voir dans l’autre que l’autre" mais de reconnaître en lui l’image de Dieu, parvenant ainsi à découvrir vraiment l’autre et à développer un amour qui "devienne soin de l’autre pour l’autre » (n. 11). Dans la théorie du genre nous sommes aux antipodes du sens de l’altérité.

Zenit : Cette nouvelle idéologie de la théorie du genre est-elle dangereuse pour l’équilibre et l’avenir de la société ?

Mgr Tony Anatrella : Le pape écrit avec juste raison que : « L’humanité tout entière est aliénée quand elle met sa confiance en des projets purement humains, en des idéologies et en de fausses utopies » (n. 53). La théorie du genre est hasardeuse dans le sens où elle établit et institue une lutte de pouvoir entre les hommes et les femmes, au mépris de leur complémentarité. Elle nie également le rôle structurant de la différence sexuelle pour laisser entendre que le masculin et le féminin ne sont que des réalités construites socialement et ne sont pas inhérents à la personne de l’homme ou de la femme. Une façon d’évacuer la singularité du sujet. Elle privilégie enfin les orientations sexuelles pour en faire diverses identités qui auraient toutes la même qualité et la même valeur. Autrement dit, nous sommes dans le déni de l’être de l’homme et de la femme au bénéfice d’une sorte d’asexualité qui débouche en même temps sur la légitimité de toutes les orientations sexuelles. Or celles-ci représentent toujours un en-deçà de l’identité sexuelle et non pas une identité. Un homme s’humanise, se civilise et se socialise non pas en fonction d’orientations sexuelles mais à partir de son identité sexuelle grâce à laquelle il intègre et coordonne ses pulsions partielles afin de développer une orientation en cohérence avec son identité. Les orientations sexuelles sont toujours du côté des pulsions partielles, alors que l’identité est du côté de l’être du sujet. Nous sommes paradoxalement dans le mythe du sujet qui construit son identité ce qui n’est pas complètement vrai et en même temps on lui laisse supposer qu’il n’est qu’une construction sociale. La loi civile établirait des identités sexuelles selon les revendications subjectives des personnes.

Zenit : Le pape insiste beaucoup sur le sens de l’amour vécu dans la vérité, cela signifie-t-il que l’amour ne se retrouve pas nécessairement dans toutes les formes de relation ?

Mgr Tony Anatrella : Très souvent n’importe quel type de relation plus ou moins attachante est présenté sous l’angle de l’amour, ce n’est pas tout à fait exact. On peut éprouver de l’attrait, des sentiments et des émotions cela n’est pas nécessairement significatif de l’amour.

L’amour exige la vérité des choses pour être authentique. Au nom de l’amour on croit que tout est possible et permis et encore davantage lorsque l’amour est confondu avec un vague sentiment de générosité, ce qu’il n’est pas. On utilise souvent l’argument d’autorité en croyant que puisque Dieu est amour il permet et tolère tout. Autrement dit, Dieu est instrumentalisé pour justifier n’importe quel acte humain à partir du moment où le sujet pense qu’il agit dans l’amour. Encore faut-il être dans la vérité de l’amour, c’est-à-dire que l’acte représente un véritable bien à atteindre et non pas inverser cette proposition en voulant que Dieu vienne reconnaître l’acte du sujet. D’où le titre donné à cette nouvelle encyclique de Benoît XVI qui s’inscrit dans la logique des deux précédentes : « Deus caritas est » (2006) et « Spe salvi » (2007) : Caritas in Veritate, l’amour n’est possible que dans la vérité.

Une révolution sourde est donc en marche depuis les années 1950 dans l’ignorance et l’inconscience des citoyens. La théorie du genre (gender theory) a ainsi pris la suite du marxisme et elle aura des conséquences encore plus néfastes que celui-ci, comme j’ai eu l’occasion de le montrer dans diverses publications. Le marxisme est une idéologie meurtrière alors que l’idéologie du genre est une théorie idéaliste qui détruit les repères les plus fondamentaux et les plus universels. J’ai ainsi souligné dans mon livre "Le règne de Narcisse" qu’elle appartient à toutes les idéologies transgressives avec lesquelles le monde occidental est en train de coloniser et de polluer intellectuellement la planète. Nous préparons tous les ingrédients pour altérer l’écologie humaine. Il y a ainsi des idées qui fabriquent de la pathologie sociale sans que l’on veuille en être conscients et évidemment sans prendre la mesure des conséquences qu’elles engagent.

Zenit : Les sciences humaines semblent jouer un rôle important pour imposer cette nouvelle idéologie qui crée des divisions artificielles dans l’humanité au lieu de respecter les différences fondamentales ?

Mgr Tony Anatrella : Sans aucun doute. Mais pour comprendre ce phénomène, il faut à la fois faire de l’histoire et observer comment les sciences humaines sont devenues normatives au point de prescrire à la société ses modes d’organisation. Ainsi les sociologues qui observent des attitudes et des comportements vont décréter que puisqu’un phénomène existe il faut, non seulement l’admettre, mais également le légaliser et en faire une norme. D’où la prolifération de lois qui viennent légitimer des mœurs au lieu de voir le législateur créer des lois au nom du bien commun. « L’exaspération des droits aboutit à l’oubli des devoirs. Les devoirs délimitent les droits parce qu’ils renvoient au cadre anthropologique et éthique dans la vérité duquel ces derniers s’insèrent et ainsi ne deviennent pas arbitraires. C’est pour cette raison que les devoirs renforcent les droits et situent leur défense et leur promotion comme un engagement à prendre en faveur du bien. » (n. 43). Le droit est actuellement organisé pour « satisfaire des attentes psychologiques ».

La théorie du genre est le pur produit des sciences humaines qui veulent reconstruire une vision de l’homme à partir d’épiphénomènes. Dans cette perspective la norme n’est plus à chercher dans la vérité des choses et leur caractère universel, mais dans la singularité des situations individuelles et marginales, et dans le ressenti. La subjectivité devient source de droit. C’est ainsi que la plupart des gouvernements occidentaux dirigent leur société à partir de ses points aveugles et minoritaires au nom du principe de la non-discrimination. Principe très discutable par ailleurs, car il ne permet plus de réfléchir, d’analyser et de faire œuvre de discernement. Avoir le souci des injustices et y remédier sont des biens précieux pour la société, mais dire que, dans n’importe quelle situation, peut se créer un couple et se constituer une famille est une impasse. La création, par exemple, du Pacs en France a été une erreur qui s’appréciera au regard de l’histoire. Il avait été revendiqué par des associations homosexuelles pour créer des partenariats civils entre personnes de même sexe. En réalité 93 % des Pacs qui sont contractés le sont par des couples formés par un homme et une femme. A partir d’une revendication minoritaire inutile, les militants ont réussi à accentuer une déstabilisation du mariage. Dans leur littérature, ils déploient tout un système subversif pour justement remettre en question les normes sexuelles de la société qui se fondent pourtant à partir d’un couple altersexué constitué par un homme et une femme. Le Pacs était une sorte de missile dirigé contre les bases de la société qui ne peut être qu’hétérosexuelle alors que la preuve est faite qu’il intéresse modérément les personnes homosexuelles. Les militants de la cause vont même plus loin en voulant que le Pacs soit célébré en mairie comme un mariage. Une vision qui fragilise le mariage institution pour en faire un simple contrat, pas plus important qu’un contrat de location. La banalisation du divorce à travers la loi avait commencé ce travail de sape, il se continue de façon encore plus radicale avec le Pacs. La plupart des droits inhérents au mariage sont ainsi attribués aux Pacsés ce qui vide le mariage de sa substance et de sa singularité. Alors que le mariage représente un bien pour la société, le Pacs amplifie à la fois la baisse des mariages et la perte du sens de la parole donnée et de l’engagement. Ce n’est pas ainsi que l’on construit une société pacifiée. Bien au contraire, on crée les conditions même de son insécurité, de ses déliaisons et des conduites réactionnelles dont témoignent les multiples violences qui se développent notamment dans la population juvénile (violences contre soi et contre les autres).

Quand tout se vaut, plus rien n’a de valeur. Nous sommes dans la confusion des pensées. Les responsables politiques manquant de réflexion anthropologique et parfois de culture sur tous ces sujets, en restent à la surface des choses se contentant d’être sous l’influence de lobbies. Ils ont le regard rivé sur les sondages d’opinion et changent de convictions au gré des fluctuations médiatiques. Le monde politique occidental fait preuve d’une certaine carence de la pensée. Le mini-traité de Lisbonne est à cet égard déficitaire : non seulement il reprend la défunte Charte européenne qui posait déjà de sérieux problèmes, mais en plus il se donne comme référence la théorie du genre en instituant sur le même registre que les droits de l’homme des orientations sexuelles, ce qui manifeste une confusion épistémologique. Le recours à la raison ne se situe plus dans la recherche du vrai et du bien, mais dans la volonté d’imposer des inclinations particulières alors qu’elles ne sont pas structurantes ni pour la personne ni pour la société. C’est pourquoi le Pape souligne fortement : « Aujourd’hui, nous sommes témoins d’une grave contradiction. Tandis que, d’un côté, sont revendiqués de soi-disants droits, de nature arbitraire et voluptuaire, avec la prétention de les voir reconnus et promus par les structures publiques, d’un autre côté, des droits élémentaires et fondamentaux d’une grande partie de l’humanité sont ignorés et violés » (n. 43). Ainsi, un enfant a droit d’être éduqué par un homme et une femme, son père et sa mère, pour soutenir ses besoins et respecter ses intérêts psychologiques, sociaux, moraux et spirituels.

Zenit : Mais d’où vient cette idéologie qui est largement méconnue ?


(à suivre)




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