Publié le : 25 mars 2009 Source : Zenit.org
Les newsPolémique en France, enthousiasme en Afrique : Mgr Riocreux fait le point
ROME, Mercredi 25 mars 2009 (ZENIT.org) - Invité par plusieurs évêques du Cameroun, et comme responsable de la Communauté francophone des radios chrétiennes, à assister à la visite du pape au Cameroun, l’évêque de Pontoise, Mgr Jean-Yves Riocreux, explique, sur le site de son diocèse, que la polémique déclenchée en France « semblait parler d’un autre voyage » que celui dont il était témoin. Nous publions ci-dessous le texte intégral de sa réflexion. * * * Ayant été témoin de la ferveur, de l’enthousiasme et de la joie de toute l’Afrique d’accueillir le successeur de Pierre, je me dois de crier face au lynchage médiatique contre Benoit XVI en France. Je dis bien « en France », car c’est surtout chez nous que l’incompréhension des propos du pape et l’exploitation politique se sont manifestées avec une virulence inouïe. Vu de Yaoundé où je me trouvais avec près de 100 évêques de tout le continent, cette polémique en France semblait parler d’un autre voyage que celui dont nous étions témoins. Et je le dis avec force : j’avais honte de la présentation journalistique et du raccourcissement du propos du pape dans l’avion le conduisant au Cameroun. Invité par plusieurs évêques de ce pays et comme responsable de la COFRAC (Communauté Francophone des radios chrétiennes), je tenais à être présent à l’évènement de la visite papale à Yaoundé. Cela m’a permis de commenter en direct l’arrivée du Saint Père sur Radio Reine, la radio catholique du Cameroun. En allant là bas, je pressentais aussi que c’était une occasion unique pour faire remonter l’information du Sud vers le Nord : faire connaître l’Afrique avec ses drames certes, mais surtout l’extraordinaire vitalité de l’Eglise catholique et l’aspiration à la paix, à la justice et à la réconciliation. De cela, rien ou très peu ont été dit puisque la France n’a entendu parler que du préservatif alors qu’au même moment, la fête autour du pape fut belle et joyeuse. Mépris d’un côté et propos déplacés qui ont engendré une incroyable haine contre le pape, et de l’autre côté, la fierté de tout un pays d’accueillir l’homme de foi, de paix et de compassion, Benoît XVI. Aussi, ce fut un vrai scandale pour moi de voir et d’entendre ce qui se disait en France sur le pape alors que nous vivions tout autre chose à Yaoundé. Interrogeant les évêques africains, ils me répondaient tous qu’ils souscrivaient pleinement aux propos de Benoit XVI puisque celui-ci avait parlé pour l’Afrique... et non pour la France. Les évêques de ce continent constatent que les campagnes anti sida par distribution de préservatifs ne font qu’augmenter le problème. Quant aux évêques anglophones, deux jours après la tempête médiatique... ils ignoraient la polémique en France ! En conséquence, l’opinion publique française matraquée par les média et les politiques n’a rien su des véritables enjeux du voyage papal dans « le continent de l’espérance » que représente l’Afrique sur le plan économique, culturel et chrétien. Voilà pourquoi maintenant je souhaite témoigner de ces trois jours avec le pape à Yaoundé. D’abord de l’extraordinaire accueil reçu par le pape. Sur les 25 kilomètres entre l’aéroport et la ville, une foule considérable manifestait sa joie et son enthousiasme. En accueillant Benoît XVI, le président Byia disait au nom du Cameroun la « fierté » d’avoir été le pays choisi pour accueillir l’Eglise de tout le continent. Présent aux deux grandes célébrations des Vêpres à la basilique Marie Reine des Apôtres le mercredi et à la magnifique messe au stade Ahidjo le jeudi, j’ai été impressionné par la beauté et la ferveur de ces liturgies, du recueillement et de longs silences contrastant avec l’exubérance manifestée au moment de l’arrivée du Saint Père. Il y eut même un symbole immédiatement interprété par nos amis africains. Alors que le pape venait d’entrer dans la basilique, une pluie abondante s’est abattue sur la colline où se dresse la basilique. Pluie, signe de bénédiction...même si elle contraignait les fidèles amassés à l’extérieur à trouver un abri précaire ou à subir cette pluie diluvienne. Puis un arc en ciel a suivi ! L’arc en ciel de Yaoundé. Quant à la messe solennelle, elle a constitué le sommet du voyage pontifical. Les chants nous rappelaient les messes chez nous, tels le « Seigneur, nous arrivons des quatre coins de l’horizon » ou « Le Seigneur nous a aimés » mais mis en musique à la manière africaine avec accompagnement aux balafons et saxophones. La liturgie elle même était extraordinairement festive dans un heureux mélange entre Credo et Pater en latin avec des chants et danses en langues locales du Cameroun et du Congo pour le Gloire à Dieu et la procession d’offrandes. Beau cadeau pour le pape à l’occasion de la Saint Joseph ! Et puis, il y eut cette émouvante et touchante rencontre avec les handicapés au « Centre Cardinal Léger » . Comme l’avait fait Jean Paul II à Tours en 1996 avec les « blessés de la vie », Benoît XVI s’est penché avec compassion vers ces malades en leur adressant les mots justes. Car ce sont aussi les discours qu’il faut maintenant lire. Chez ce pape, les propos sont toujours denses et précis à l’image de son discours aux Bernardins à Paris et de ses méditations à Lourdes. Notre pape donne des textes riches à méditer et à reprendre. Le moment essentiel de cette visite fut naturellement celui de la remise de l’Instrumentum Laboris aux présidents des conférences épiscopales d’Afrique pour le synode d’octobre. Après le premier synode de 1994 et l’exhortation apostolique sur la mission évangélisatrice, voici maintenant ce travail sur le thème approprié de « la paix, de la justice et de la réconciliation ». Dans le document « Ecclesia in Africa » de 1995, il est écrit que « L’Afrique, dans la diversité de ses rites, danse de joie, exprime sa foi dans la vie, au son des tam-tams et d’autres instruments de musique africains ». A Yaoundé, nous l’avons vu, le pape était visiblement heureux de cet enthousiasme. Ce même texte aborde aussi la question du SIDA, en disant que « la lutte doit être le combat de tous ». Tous savent que, en Afrique, l’Eglise est au premier rang de cette lutte et le pape l’a rappelé dans l’interview donnée dans l’avion...mais cette mention a été hélas occultée, comme toute la réflexion qui a précédé ou suivi les deux petites phrases retenues. En revenant ici en France et dans mon diocèse, j’étais à la fois rempli de tristesse devant cette incompréhension de notre pays sur la mission du pape, et dans le même temps, comblé de joie par la célébration de ce 4ème dimanche de Carême. En effet, en ce jour, en l’église de Jouy le Moutier, j’instituais lecteur et acolyte en vue du diaconat un père de famille d’origine camerounaise, Louis Bède. Présent dans le Val d’Oise depuis 20 ans, il est ingénieur et actif dans le catéchuménat diocésain. Son père est connu dans le pays comme un chrétien exemplaire, enseignant et traducteur en langue Ewondo de la Bible et de la Liturgie. Là bas, à Yaoundé, j’ai rencontré la famille de Louis Bède et de Bertille, son épouse. Ils étaient heureux de ce lien entre nos Eglises et fiers de la visite du pape chez eux. C’est ce bonheur que je retiens, celui de toute l’Afrique, d’avoir accueilli magnifiquement le successeur de Pierre. + Jean Yves Riocreux, évêque de Pontoise Zenit.org, 2006. Tous droits réservés - Pour connaitre les modalités d´utilisation vous pouvez consulter : www.zenit.org ou contacter infosfrench@zenit.org - Pour recevoir les news de Zenit par mail vous pouvez cliquer ici |