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 - 17 mai 2024 - Saint Pascal Baylon
Publié le : 11 septembre 2005 Source : Zenit.org
 

 

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Pourquoi pardonner ? Réponse du prédicateur de la Maison pontificale

ROME, Dimanche 11 septembre 2005 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le commentaire de l’Evangile de ce dimanche (Mt 18,21-35) que propose le père Raniero Cantalamessa OFM Cap, prédicateur de la Maison pontificale.

L’Evangile de l’espérance
XXIV du temps ordinaire (année A) – 11 septembre 2005

Mais combien de fois faut-il pardonner ?

Evangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu 18, 21-35.

Pierre s’approcha de Jésus pour lui demander : « Seigneur, quand mon frère commettra des fautes contre moi, combien de fois dois-je lui pardonner ? Jusqu’à sept fois ? »
Jésus lui répondit : « Je ne te dis pas jusqu’à sept fois, mais jusqu’à soixante-dix fois sept fois.
En effet, le Royaume des cieux est comparable à un roi qui voulut régler ses comptes avec ses serviteurs.
Il commençait, quand on lui amena quelqu’un qui lui devait dix mille talents (c’est-à-dire soixante millions de pièces d’argent).
Comme cet homme n’avait pas de quoi rembourser, le maître ordonna de le vendre, avec sa femme, ses enfants et tous ses biens, en remboursement de sa dette.
Alors, tombant à ses pieds, le serviteur demeurait prosterné et disait : ’Prends patience envers moi, et je te rembourserai tout.’
Saisi de pitié, le maître de ce serviteur le laissa partir et lui remit sa dette.
Mais, en sortant, le serviteur trouva un de ses compagnons qui lui devait cent pièces d’argent. Il se jeta sur lui pour l’étrangler, en disant : ’Rembourse ta dette !’
Alors, tombant à ses pieds, son compagnon le suppliait : ’Prends patience envers moi, et je te rembourserai.’
Mais l’autre refusa et le fit jeter en prison jusqu’à ce qu’il ait remboursé.
Ses compagnons, en voyant cela, furent profondément attristés et allèrent tout raconter à leur maître.
Alors celui-ci le fit appeler et lui dit : ’Serviteur mauvais ! Je t’avais remis toute cette dette parce que tu m’avais supplié.
Ne devais-tu pas, à ton tour, avoir pitié de ton compagnon, comme moi-même j’avais eu pitié de toi ?’
Dans sa colère, son maître le livra aux bourreaux jusqu’à ce qu’il ait tout remboursé.
C’est ainsi que mon Père du ciel vous traitera, si chacun de vous ne pardonne pas à son frère de tout son coeur. »
Traduction Liturgique de la Bible - © AELF, Paris

Pardonner est une chose sérieuse, humainement difficile, voire impossible. On ne doit pas en parler à la légère, sans se rendre compte de ce que l’on demande à la personne offensée, lorsqu’on lui dit de pardonner. Lorsque l’on donne à l’homme le commandement de pardonner, il faut aussi lui fournir une raison pour le faire. C’est ce que fait Jésus avec la parabole du roi et des deux serviteurs. La parabole explique clairement pourquoi il faut pardonner : parce que Dieu a pardonné et nous pardonne, le premier. Il nous remet une dette infiniment plus grande que celle que l’un de nos semblables peut avoir à notre égard. La différence entre la dette envers le roi (dix mille talents) et la dette envers le compagnon (cent pièces d’argent) correspondrait de nos jours à trois millions d’euros et quelques centimes !

Saint Paul peut dire désormais : « Le Seigneur vous a pardonné, faites de même à votre tour » (Col 3,13). La loi du talion est dépassée : « Œil pour œil, dent pour dent ». Le critère n’est plus : « Ce que l’autre t’a fait, fais-le à lui » ; mais « Ce que Dieu t’a fait, toi fais-le à l’autre ». Jésus ne s’est pas limité du reste à nous commander de pardonner ; il l’a fait, lui, le premier. Alors qu’on était en train de le crucifier sur la croix, il pria en disant : « Père, pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu’ils font » (Lc 23,34). C’est ce qui différencie la foi chrétienne de toute autre religion.

Bouddha a lui aussi laissé une maxime à ses disciples : « Ce n’est pas avec le ressentiment que l’on apaise le ressentiment ; c’est avec le non-ressentiment que l’on apaise le ressentiment ». Mais le Christ ne se limite pas à indiquer la voie de la perfection ; il donne la force pour l’emprunter. Il ne nous commande pas seulement de faire, il agit avec nous. C’est en cela que consiste la grâce. Le pardon chrétien va au-delà de la non-violence et du non-ressentiment.

On pourrait objecter : pardonner soixante dix fois sept fois, n’est-ce pas encourager l’injustice et donner son feu vert à la tyrannie ? Non, le pardon chrétien n’exclut pas que tu puisses aussi, dans certains cas, dénoncer la personne et la traduire en justice, surtout lorsque sont en jeu les intérêts et le bien d’autres personnes encore. Le pardon chrétien n’a pas empêché, pour citer un exemple qui nous est proche, aux veuves de certaines victimes de la terreur ou de la mafia, de rechercher avec ténacité la vérité et la justice concernant la mort de leurs maris.

Mais il n’y a pas que les grands pardons ; il y a aussi les pardons de tous les jours : dans la vie de couple, dans le travail, entre les membres d’une famille, entre amis, collègues, connaissances. Que faire lorsqu’on découvre que l’on a été trahi par son conjoint ? Pardonner ou se séparer ? C’est une question trop délicate ; on ne peut imposer aucune loi de l’extérieur. La personne doit découvrir en elle-même ce qu’elle doit faire.
Je peux toutefois dire une chose. J’ai connu des cas où la personne offensée a trouvé, dans son amour pour l’autre et l’assistance de la prière, la force de pardonner à son conjoint qui avait eu tort, mais qui était sincèrement repenti. Le mariage était reparti, comme de ses cendres, et avait connu une sorte de nouveau commencement. Personne ne peut certes prétendre que cela advienne, dans un couple, « soixante dix fois sept fois ».

Nous devons être attentifs à ne pas tomber dans un piège. Il y a aussi un risque dans le pardon : celui de développer la mentalité de croire que l’on a toujours quelque chose à pardonner aux autres. Le danger de se croire toujours créditeur de pardon et jamais débiteur. Si nous réfléchissions bien, très souvent, lorsque nous sommes sur le point de dire : « Je te pardonne ! » nous changerions notre attitude et nos paroles et dirions à la personne qui est devant nous : « Pardonne-moi ! » Nous nous rendrions compte que nous aussi avons quelque chose à nous faire pardonner d’elle. Demander pardon est plus important encore que pardonner.



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