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 - 13 mai 2024 - Notre-Dame de Fatima
Publié le : 11 août 2005 Source :
 

 

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Les JMJ réalisent les rêves les plus fous de l’Église allemande

(La Croix) La Mercedes blanche trône sur son podium ,au milieu de la place de la Cathédrale, où les ouvriers posent à la hâte les derniers dallages. « La voiture, c’est le premier prix de la loterie des JMJ », les Journées mondiales de la jeunesse, bonimente un volontaire aux passants. Le billet vaut 2 € et peut rapporter gros « ... pour les plus chanceux », poursuit le jeune vendeur. À Cologne, difficile d’ignorer la grande manifestation catholique qui se prépare. Outre les travaux pour refaire la place du Dom (la cathédrale), depuis des mois le logo des JMJ pavoise sur les murs des lieux de culte et bâtiments d’Église - et ils sont nombreux dans ce diocèse du cœur catholique de l’Allemagne.

Derrière, une organisation impressionnante s’est mise en place. Au centre-ville, le bureau des JMJ occupe les trois étages d’un immeuble face à la chambre de commerce, et une partie de l’équipe a même dû être logée dans un second bâtiment, plus loin. À l’intérieur, 200 personnes (âge moyen : 25 ans) mettent la dernière main aux préparatifs. Accroché au mur, le timbre des JMJ, que le gouvernement allemand a publié pour l’occasion, trône à côté du certificat de respect des normes écologiques, l’une des obsessions des responsables.

Rien n’est laissé au hasard, et le journaliste ploie rapidement sous la masse d’informations disponibles : du nombre de kilos de pain acheté au poids exact du support de la croix des JMJ, en passant par les normes techniques de l’autel où Benoît XVI officiera... Tout semble minuté, recensé, prévu dans les moindres détails. Début juillet, une lettre a ainsi été envoyée aux familles d’accueil des participants pour leur expliquer que, selon les nouvelles réglementations, ils ne pouvaient servir à boire à leurs jeunes hôtes « qu’à condition d’ouvrir la bouteille devant eux » ! Les habitants de Cologne, qui ont le sens de l’humour, en rient encore.

"Il a fallu lutter contre un certain scepticisme"

Il y a deux ans cependant, la « greffe JMJ » a eu du mal à prendre sur l’Église allemande. « Il a fallu lutter contre un certain scepticisme », admet Matthias Kopp, le porte-parole de ces JMJ. Les inscriptions ont démarré lentement. « Leur nombre a progressivement augmenté », explique le jésuite Hans Langendörfer, secrétaire de la Conférence des évêques catholiques allemands : aujourd’hui, constate-t-il avec satisfaction, « le nombre des jeunes Allemands inscrits est plus de dix fois supérieur par rapport à Toronto ». « Les responsables ont mis du temps à comprendre que la pastorale des jeunes, telle qu’elle était envisagée par Jean-Paul II, était une bonne approche et que, à certains égards, elle se distinguait des méthodes habituelles chez nous », reconnaît-il, ajoutant cependant : « Cette approche est certainement conciliable avec les expériences faites par les associations de la jeunesse catholique en place en Allemagne et peut les enrichir. » (Lire La Croix du 8 août.)

L’effort, en tout cas, est important. Le budget des JMJ devrait s’élever à 90 millions d’euros pour une affluence estimée entre 600 000 et 800 000 jeunes. Matthias Kopp fait ses comptes, ravi : « Au départ, on avait tablé sur 25 000 jeunes volontaires. Ils sont plus de 31 000 à s’être spontanément présentés. »

« C’est incroyable, appuie Gerda, jeune volontaire de 24 ans : des amis qui ne fréquentaient plus du tout l’Église sont venus proposer leurs services. Cela fait très chic ! » La jeune étudiante éclate de rire : « Même les grands-parents ne veulent pas être en reste. Ils sont prêts à faire les gâteaux, à distribuer du café... » Lorsque la croix des JMJ est arrivée à Cologne, ultime étape d’un pèlerinage à travers le pays, chacun a été impressionné par la foule venue à la cathédrale pour l’accueillir.

L’Église catholique allemande est en ordre de marche. Dans toutes les paroisses du diocèse de Cologne, la mobilisation a porté ses fruits. « L’Église a fait taire ses divisions, témoigne Rolf Schumacher, l’un des responsables du ZdK, le Comité central des laïcs catholiques allemands. Dans une Église plurielle, aux multiples tendances régionales comme idéologiques, les problèmes de structures sont passés au second plan. »

Une attente à la mesure de l’énorme effort investi

« C’est un coup d’optimisme pour une institution dépressive », se réjouit de son côté, à Bonn, le P. Ralf Birkner. Pour lui, ces JMJ seront l’occasion d’oublier les difficultés nées des restructurations et regroupements de paroisses. Ici, chacun formule son souhait pour les journées de Cologne... Une attente à la mesure de l’énorme effort investi. Pour Gerda, habituée des rencontres de Taizé, les JMJ devraient ouvrir sur d’autres manières de croire, de prier, en Europe et dans le monde. « La plupart de nos jeunes seront étonnés, pronostique d’ailleurs le P. Wilfried Schumacher, curé de la basilique de Bonn. Voir autant de jeunes prier va leur sembler extraordinaire. » En soi, estime-t-il, le thème même de ces JMJ (« Nous sommes venus l’adorer ») résonne comme une provocation : « Cette fois, la jeunesse allemande va découvrir que l’on peut faire la fête et se réjouir autrement qu’à coups de canettes de bière... ! » s’exclame-t-il. La joie, c’est le souhait de Sœur Gabrielle, bénédictine à Cologne : « En Allemagne, croire est souvent trop sérieux. Là, on va comprendre que la foi peut être colorée, et jeune... »

L’Église allemande est très refermée sur elle-même, et les JMJ devraient montrer l’universalité catholique, espère de son côté Knuth Erbe, président de la puissante Fédération de la jeunesse catholique allemande (BDKJ). En bon militant, le jeune responsable y voit aussi un avantage dans les rapports à la société allemande : « Les hommes politiques vont comprendre que l’Église a encore la capacité de rassembler, et de peser sur la société », se réjouit-il. « Nous allons montrer à toute l’Allemagne que l’Église a un visage jeune », renchérit Matthias Kopp. Pour le porte-parole des JMJ , la manifestation vaut toutes les démonstrations autour de la mention ou non des racines chrétiennes dans la Constitution européenne.

L’Église catholique allemande, fragilisée par ses difficultés financières, par la crise de vocations et plus largement par la sécularisation, compte sur ces JMJ pour redorer un blason un peu terni. Trop ? Sœur Gabrielle craint que les catholiques allemands n’aient ensuite, dit-elle, une sorte de « gueule de bois » (en français dans le texte !). « Peut-être en a-t-on trop fait », glisse, vaguement inquiet, le P. Birkner, indiquant sur une feuille l’impressionnante liste des ateliers et animations prévus. Et au sujet du thème de ces journées : les Rois mages venant adorer l’Enfant Jésus : « Or, Bethléem, c’est la pauvreté, la simplicité, l’humilité confiante », dit-il. Là, on en paraît loin... « Le mieux, pour l’Église allemande, serait qu’elle se laisse bousculer un peu par l’événement. Que pour une fois elle sache sortir de ses propres structures », murmure le prêtre.

Isabelle de GAULMYN
pour lacroix.com


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