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 - 21 décembre 2024 - Saint Pierre Canisius
Publié le : 1er juillet 2009 Source : Zenit.org
 

 

Les news

Homélie du pape pour la clôture de l’Année paulinienne

ROME, Mercredi 1er juillet 2009 (ZENIT.org). - Nous publions ci-dessous l’homélie prononcée par le pape Benoît XVI lors des premières vêpres de la solennité des saints Pierre et Paul, clôture de l’Année paulinienne, dans la Basilique Saint-Paul hors les murs, le dimanche 28 juin 2009.

 :

Messieurs les cardinaux,

Vénérés frères dans l’épiscopat et dans le sacerdoce,

Illustres membres de la délégation du patriarcat œcuménique,

Chers frères et sœurs,

J’adresse à chacun mon salut cordial. Je salue en particulier le cardinal-archiprêtre de cette basilique et ses collaborateurs, je salue l’abbé et la communauté monastique bénédictine ; je salue également la délégation du patriarcat œcuménique de Constantinople. L’année commémorative de la naissance de saint Paul se conclut ce soir. Nous sommes recueillis auprès de la tombe de l’apôtre, dont le sarcophage, conservé sous l’autel papal, a été récemment l’objet d’une analyse scientifique approfondie : dans le sarcophage, qui n’a jamais été ouvert pendant tous ces siècles, a été pratiquée une toute petite ouverture pour introduire une sonde spéciale, à travers laquelle ont été relevées des traces d’un précieux tissu de lin de couleur pourpre, mêlé de fils d’or pur, et d’un tissu de couleur bleue avec des filaments de lin. On a également relevé la présence de grains d’encens rouge et de substances protéinées et calcaires. En outre, de tout petits fragments d’os, soumis à l’examen du carbone 14 par des experts ignorant leur provenance, ont résulté appartenir à une personne ayant vécu entre le Ier et le IIe siècle. Cela semble confirmer la tradition unanime et incontestée qu’il s’agit de la dépouille mortelle de l’apôtre Paul. Tout cela remplit notre âme d’une profonde émotion. De nombreuses personnes ont, au cours de ces mois, suivi les voies de l’apôtre - les voies extérieures et plus encore les voies intérieures, qu’il a parcourues au cours de sa vie : le chemin de Damas vers la rencontre avec le ressuscité ; les routes du monde méditerranéen, qu’il a empruntées avec la flamme de l’Evangile, rencontrant des contradictions et des adhésions, jusqu’au martyre, en vertu duquel il appartient pour toujours à l’Eglise de Rome. C’est à elle qu’il a adressé sa Lettre la plus grande et la plus importante. L’Année paulinienne se conclut, mais être en chemin avec Paul, avec lui et grâce à lui faire la connaissance de Jésus et, comme lui, être illuminés et transformés par l’Evangile - cela fera toujours partie de l’existence chrétienne. Et, au-delà du monde des croyants, il reste toujours le « maître des nations », qui veut apporter le message du Ressuscité à tous les hommes, car le Christ les a connus et tous aimés ; il est mort et ressuscité pour eux tous. Nous voulons donc l’écouter également en cette heure où nous commençons solennellement la fête des deux apôtres unis entre eux par un lien étroit.

 La caractéristique des Lettres de Paul est que celles-ci - toujours en référence à un lieu et une situation particulière - expliquent tout d’abord le mystère du Christ, nous enseignent la foi. Dans une deuxième partie, suit l’application à notre vie : qu’est-ce que cette foi implique ? Comment celle-ci façonne-t-elle notre existence jour après jour ? Dans la Lettre aux Romains, cette deuxième partie commence avec le douzième chapitre, dans les deux premiers versets duquel l’apôtre résume immédiatement le noyau essentiel de l’existence chrétienne. Que nous dit saint Paul dans ce passage ? Tout d’abord il affirme, comme une chose fondamentale, qu’avec le Christ a commencé une nouvelle façon de vénérer Dieu - un nouveau culte. Celui-ci consiste dans le fait que l’homme vivant devient lui-même adoration, « sacrifice » jusque dans son propre corps. Ce ne sont plus les choses qui sont offertes à Dieu. C’est notre existence elle-même qui doit devenir louange de Dieu. Mais comment cela se produit-il ? Dans le deuxième verset une réponse nous est donnée : « Ne prenez pas pour modèle le monde présent, mais transformez-vous en renouvelant votre façon de penser pour savoir reconnaître quelle est la volonté de Dieu... » (12, 2). Les deux mots décisifs de ce verset sont : « transformer » et « renouveler ». Nous devons devenir des hommes nouveaux, transformés en une nouvelle façon d’exister. Le monde est toujours à la recherche de nouveautés, car à juste titre il est toujours insatisfait de la réalité concrète. Paul nous dit : le monde ne peut pas être renouvelé sans des hommes nouveaux. Ce n’est qu’avec des hommes nouveaux qu’existera un monde nouveau, un monde renouvelé et meilleur. Au début, se trouve le renouveau de l’homme. Cela vaut ensuite pour chaque individu. Ce n’est que si nous-mêmes devenons nouveaux, que le monde devient nouveau. Cela signifie également qu’il ne suffit pas de s’adapter à la situation actuelle. L’apôtre nous exhorte à un non-conformisme. Dans la lettre en question, il est dit de ne pas se soumettre au schéma de l’époque actuelle. Nous devrons revenir sur ce point, en réfléchissant sur le deuxième texte sur lequel je veux méditer avec vous ce soir. Le « non » de l’apôtre est clair et également convaincant pour quiconque observe le « schéma » de notre monde. Mais comment peut-on devenir nouveaux ? En sommes-nous vraiment capables ? Avec la parole concernant le fait de devenir nouveaux, Paul fait allusion à sa propre conversion : à sa rencontre avec le Christ ressuscité, une rencontre dont il dit dans la Deuxième lettre aux Corinthiens : « Si donc quelqu’un est en Jésus Christ, il est une créature nouvelle. Le monde ancien s’en est allé, un monde nouveau est déjà né » (5, 17). Cette rencontre avec le Christ était tellement bouleversante pour lui qu’il dit à ce propos : « J’ai cessé de vivre » (Ga 2,19 ; cf. Rm 6). Il est devenu nouveau, un autre, parce qu’il ne vit plus pour lui-même et en vertu de lui-même, mais pour le Christ et en Lui. Au cours des années, il a cependant également vu que ce processus de renouveau et de transformation se poursuit pendant toute la vie. Nous devenons nouveaux si nous nous laissons saisir et façonner par l’Homme nouveau Jésus Christ. Il est  l’Homme nouveau par excellence. En Lui, la nouvelle existence humaine est devenue réalité, et nous pouvons vraiment devenir nouveaux si nous nous remettons entre ses mains et que nous nous laissons façonner par Lui.

 Paul détaille plus encore ce processus de « refusion » en disant que nous devenons nouveaux si nous transformons notre façon de penser. Ce qui a ici été traduit comme « façon de penser », est le terme grec « nous ». Il s’agit d’un terme complexe. Il peut être traduit par « esprit », « sentiments », « raison » et, précisément, également par « façon de penser ». Notre raison doit devenir nouvelle. Cela nous surprend. Nous nous serions peut-être attendu à ce que cela concerne plutôt certaines attitudes : ce que nous devons changer dans notre façon d’agir. Mais non : le renouveau doit aller jusqu’au bout. Notre façon de voir le monde, de comprendre la réalité - toute notre manière de penser doit se transformer à partir de sa base. La pensée du vieil homme, la façon de penser commune est généralement tournée vers la possession, le bien-être, l’influence, le succès, la célébrité et ainsi de suite. Mais de cette manière, elle a une portée trop limitée. Ainsi, en dernière analyse, le « moi » reste le centre du monde. Nous devons apprendre à penser de manière plus profonde. Saint Paul nous dit ce que cela signifie dans la deuxième partie de la phrase : il faut apprendre à comprendre la volonté de Dieu, de manière à ce que celle-ci façonne notre volonté. Afin que nous-mêmes voulions ce que Dieu veut, car nous reconnaissons que ce que Dieu veut est le beau et le bon. Il s’agit donc d’un tournant dans notre orientation spirituelle de fond. Dieu doit entrer dans l’horizon de notre pensée : ce qu’Il veut et la manière dont Il a créé le monde et moi. Nous devons apprendre à prendre part à la pensée et à la volonté de Jésus Christ. C’est alors que nous serons des hommes nouveaux dans lesquels apparaît un monde nouveau.

 Cette même pensée d’un renouveau nécessaire de notre personne humaine est ultérieurement illustrée par Paul dans deux passages de la Lettre aux Ephésiens, sur lesquels nous voulons encore réfléchir brièvement. Dans le quatrième chapitre de la Lettre, l’apôtre nous dit qu’avec le Christ nous devons atteindre l’âge adulte, une foi mûre. Nous ne pouvons plus rester « comme des enfants, nous laissant secouer et mener à la dérive par tous les courants d’idées... » (4, 14). Paul désire que les chrétiens aient une foi « responsable », une « foi adulte ». L’expression « foi adulte » est devenue un slogan fréquent ces dernières années. Mais on l’entend souvent au sens de l’attitude de celui qui n’écoute plus l’Eglise et ses pasteurs, mais qui choisit de manière autonome ce qu’il veut croire ou ne pas croire - donc une foi « bricolée ». Et on la présente comme le « courage » de s’exprimer contre le magistère de l’Eglise. Mais en réalité, il n’y a pas besoin de courage pour cela, car l’on peut toujours être sûr de l’ovation du public. Il faut plutôt du courage pour adhérer à la foi de l’Eglise, même si celle-ci contredit le « schéma » du monde contemporain. C’est ce non-conformisme de la foi que Paul appelle une « foi adulte ». C’est la foi qu’il veut. Il qualifie en revanche d’infantile le fait de courir derrière les modes et les courants de l’époque. Par exemple, il appartient à la foi adulte de s’engager pour l’inviolabilité de la vie humaine dès son premier moment, en s’opposant radicalement au principe de la violence, précisément aussi en défense des créatures humaines les plus faibles. Il appartient à la foi adulte de reconnaître le mariage entre un homme et une femme pour toute la vie comme une disposition du Créateur, à nouveau rétablie par le Christ. La foi adulte ne se laisse pas transporter ici et là par n’importe quel courant. Elle s’oppose aux vents de la mode. Elle sait que ces vents ne sont pas le souffle de l’Esprit Saint ; elle sait que l’Esprit de Dieu s’exprime et se manifeste dans la communion avec Jésus Christ. Toutefois, ici aussi Paul ne s’arrête pas à la négation, mais il nous conduit au grand « oui ». Il décrit la foi mûre, vraiment adulte de manière positive par l’expression : « agir selon la vérité dans la charité » (cf. Ep 4, 15). La nouvelle façon de penser, qui nous est donnée par la foi, se tourne tout d’abord vers la vérité. Le pouvoir du mal est le mensonge. Le pouvoir de la foi, le pouvoir de Dieu est la vérité. La vérité sur le monde et sur nous-mêmes devient visible lorsque nous tournons notre regard vers Dieu. Et Dieu apparaît à nous dans le visage de Jésus Christ. En regardant le Christ nous reconnaissons une chose supplémentaire : vérité et charité sont inséparables. En Dieu, les deux sont une chose indissoluble : telle est précisément l’essence de Dieu. C’est pourquoi, pour les chrétiens vérité et charité vont de pair. La charité est la preuve de la vérité. Nous devrons toujours à nouveau être mesurés selon ce critère, qui est que la vérité devient charité et la charité nous rend authentiques.

 Une autre pensée importante apparaît encore dans le verset de saint Paul. L’apôtre nous dit que, en agissant selon la vérité dans la charité, nous contribuons à faire en sorte que le tout - l’univers - croisse en tendant vers le Christ. Paul, à partir de sa foi, ne s’intéresse pas seulement à notre droiture personnelle et pas seulement à la croissance de l’Eglise. Il s’intéresse à l’univers : ta pánta. Le but ultime de l’œuvre du Christ est l’univers - la transformation de l’univers, de tout le monde humain, de toute la création. Celui qui avec le Christ sert la vérité dans la charité contribue au véritable progrès du monde. Oui, il est ici tout à fait clair que Paul connaît l’idée de progrès. Le Christ, sa vie, sa souffrance et sa résurrection ont été le véritable grand saut du progrès pour l’humanité, pour le monde. A présent, cependant, l’univers doit croître en vue du Christ. Là où augmente la présence du Christ se trouve le véritable progrès du monde. Là, l’homme devient nouveau et ainsi le monde devient nouveau.

 Encore à partir d’un point de vue différent, Paul nous rend la même chose évidente. Dans le troisième chapitre de la Lettre aux Ephésiens il nous parle de la nécessité d’être « rendus forts dans l’homme intérieur » (3, 16). Il reprend là un thème qu’il avait traité auparavant, dans une situation de difficulté, dans la Deuxième Lettre aux Corinthiens : « Même si en nous l’homme extérieur va vers sa ruine, l’homme intérieur se renouvelle de jour en jour » (4, 16). L’homme intérieur doit se renforcer - c’est un impératif particulièrement approprié pour notre époque où les hommes sont si souvent intérieurement vides et doivent donc se raccrocher à des promesses et des drogues, qui ont ensuite comme conséquence un accroissement ultérieur du sentiment de vide en eux-mêmes. Le vide intérieur - la faiblesse de l’homme intérieur - est l’un des grands problèmes de notre temps. L’intériorité doit être renforcée - la capacité de perception du cœur ; la capacité de voir et comprendre le monde et l’homme de l’intérieur, avec le cœur. Nous avons besoin d’une raison éclairée par le cœur, pour apprendre à agir selon la vérité dans la charité. Toutefois, cela ne se réalise pas sans une relation intime avec Dieu, sans la vie de prière. Nous avons besoin de la rencontre avec Dieu, qui nous est donnée dans les sacrements. Et nous ne pouvons pas parler à Dieu dans la prière, si nous ne le laissons pas parler d’abord, si nous ne l’écoutons pas dans la parole qu’il nous a donnée. Paul écrit à cet égard : « Que le Christ habite en vos cœurs par la foi ; restez enracinés dans l’amour, établis dans l’amour. Ainsi vous serez capables de comprendre avec tous les fidèles quelle est la largeur, la longueur, la hauteur, la profondeur... Vous connaîtrez l’amour du Christ qui surpasse tout ce qu’on peut connaître » (Ep 3, 17sq). L’amour voit plus loin que la simple raison, voilà ce que Paul nous dit avec ces mots. Et il nous dit encore que ce n’est que dans la communion avec tous les saints, c’est-à-dire dans la grande communauté de tous les croyants - et non contre elle ou sans elle - que nous pouvons connaître la grandeur du mystère du Christ. Il définit cette ampleur avec des mots qui veulent exprimer la dimension du cosmos : largeur, longueur, hauteur et profondeur. Le mystère du Christ a une ampleur cosmique : Il n’appartient pas seulement à un groupe déterminé. Le Christ crucifié embrasse l’univers en entier dans toutes ses dimensions. Il prend le monde entre ses mains et le porte en haut, vers Dieu. A commencer par saint Irénée de Lyon - donc dès le IIe siècle - les Pères ont vu dans ce terme de la largeur, de la longueur, de la hauteur et de la profondeur de l’amour du Christ une allusion à la Croix. L’amour du Christ a embrassé dans la Croix la profondeur la plus basse - la nuit de la mort, et la hauteur suprême - l’élévation de Dieu lui-même. Et il a pris entre ses bras l’ampleur et la largeur de l’humanité et du monde dans toutes leurs dimensions. Il embrasse toujours l’univers - nous tous.

 Prions le Seigneur, afin qu’il nous aide à reconnaître quelque chose de l’ampleur de son amour. Prions-Le afin que son amour et sa vérité touchent notre cœur. Demandons que le Christ habite nos cœurs et fasse de nous des hommes nouveaux, qui agissent selon la vérité dans la charité. Amen !



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