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 - 16 mars 2024 - Ste Bénédicte
Publié le : Source : Zenit.org
 

 

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Burundi : Rapatriement musclé de milliers de réfugiés au Rwanda

ROME, Mardi 14 juin 2005 (ZENIT.org) – Le camp de réfugiés de Songore, au nord du Burundi, où se trouvaient près de 8.000 réfugiés rwandais, a été complètement vidé et environ 4.700 de ses occupants ont été transférés au-delà de la frontière, au Rwanda, par l’armée burundaise, indique l’agence missionnaire italienne Misna qui cite des sources sur les lieux. Un viol de la Convention de 1951 qui protège les réfugiés, a protesté l’UNHCR.

Ces sources indiquent en effet que le rapatriement s’est conclu lundi après-midi, avec près de 24 heures d’avance sur les indications fournies par les autorités rwandaises et burundaises, établies dimanche dernier dans une rencontre conjointe.

Ces réfugiés y avaient été définis comme des « immigrés clandestins » et leur expulsion avait été décrétée.

« Ils avaient donné du temps aux personnes pour quitter volontairement le camp hier ou être expulsées aujourd’hui, et au contraire elles ont toutes été expulsées immédiatement », dit une source de Misna qui a assisté aux opérations de transfert, à Ngozi, chef-lieu de la province de même nom, située dans le nord du Burundi, ville frontalière avec le Rwanda.

« Le camp a été fermé hier à 16h00 », a expliqué Jacques Bizobigomba, administrateur de Songore, à une dizaine de kilomètres de Ngozi. « Tous les Rwandais ont été rapatriés et ils sont tous partis volontairement », souligne le fonctionnaire burundais.

Le départ volontaire est toutefois contesté par le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) qui souligne dans une note que "peu nombreux sont ceux qui sont montés volontairement à bord des camions ».

Le témoin de Misna raconte : « J’ai vu de mes propres yeux un groupe de femmes, d’enfants et de personnes âgées que l’on a fait monter sur les camions réquisitionnés par l’armée burundaise. Ils nous ont dit qu’il s’agissait d’un groupe qui hier avait essayé de s’échapper du camp et que cela justifiait le fait que les militaires aient pointé leurs fusils contre eux. Entre cris et pleurs, ces personnes ont été installées à bord des véhicules, donnant vie à une scène qui semblait bien peu celle d’un choix volontaire. Les soldats ont ensuite procédé au changement des plaques d’immatriculation, en remplaçant celles burundaises par des plaques rwandaises ».

« Tout cela s’est passé devant les yeux des fonctionnaires des deux pays, mais aussi de diplomates occidentaux et du personnel des agences humanitaires internationales, contraints de rester à l’extérieur de Songore après que l’accès au camp leur ait été nié », toujours selon la même source.

Le HCR comme l’organisation Médecins sans frontières (MSF) ont critiqué la décision d’empêcher l’entrée dans le camp à leur personnel. L’affaire des réfugiés rwandais au Burundi a créé plus d’une friction entre les opérateurs humanitaires et le gouvernement de Bujumbura, qui après avoir menacé d’expulsion les membres de quelques ONG les ont accusés de « gonfler volontairement le nombre de réfugiés ».

« À l’intérieur du camp se trouvaient seulement 4.787 Rwandais et 153 Burundais. Les opérateurs humanitaires ont gonflé intentionnellement ces chiffres », a dit M. Bizobigomba à l’agence de presse burundaise "Azania".

Selon le HCR, ce sont près de 8.000 citoyens rwandais (surtout des femmes et des enfants) qui ont passé la frontière à partir du mois de mars par crainte des jugements des Gacaca, les tribunaux populaires qui épaulent la magistrature ordinaire pour les cas de génocide remontant à 1994.

Ayant débuté avec la fuite de quelques centaines de personnes, le flux de Rwandais ayant préféré abandonner leur pays a connu une croissance continue au fil des semaines. Ces mouvements de population avaient irrité le gouvernement rwandais qui, ces derniers mois, a commencé à faire pression sur son voisin burundais afin qu’il trouve une solution à cette situation.

Suite à un accord avec le Rwanda, le gouvernement du Burundi avait décidé de ne pas concéder le statut de réfugiés aux Rwandais, au contraire requis par des organisations non gouvernementales et par le HCR. Cet organisme de l’ONU a condamné aujourd’hui ces expulsions en soulignant que les deux gouvernements « ont violé la Convention de 1951 qui protège les réfugiés ».

Les circonstances du rapatriement de ces quelque milliers de Rwandais du Burundi laissent penser que les demandeurs d’asile n’ont pas eu le choix. « Le Haut commissariat des Nations Unies aux réfugiés (HCR) ne peut donc pas considérer leur rapatriement volontaire », ce qui constitue « une violation du principe de non-refoulement », soit le retour forcé dans un pays où il y a des raisons de craindre des persécutions, contenu dans la convention de Genève de 1951 sur les réfugiés, dont le Burundi et le Rwanda sont signataires.

Le HCR déplore que les gouvernements rwandais et burundais n’aient pas interrompu leurs opérations de rapatriement et aient refusé l’accès au centre des agents du HCR, en dépit de la disponibilité à collaborer pour trouver une « solution constructive et conforme au droit international ».

D’après les témoignages recueillis sur place, « tous les rapatriements n’ont pas été volontaires », a déclaré à Misna Catherine Lune Grayson, porte-parole du HCR au Burundi, contactée par téléphone. Depuis le mois de mars, des milliers de Rwandais avaient fui leur pays pour se soustraire aux tribunaux populaires, les « Gacaca », qui épaulent la magistrature ordinaire pour juger les auteurs présumés de crimes mineurs commis durant le génocide de 1994.

« Nous n’avons pas de chiffres exacts, mais d’après des recensements sommaires, la majorité des personnes rapatriées ces jours-ci sont des femmes et des enfants qui ne fuyaient pas les tribunaux » a ajouté l’interlocutrice. « Beaucoup de Rwandais ont dénoncé un climat d’intimidations et un climat de violence dans leur pays, ce qui les aurait poussés à prendre la fuite ».

Dimanche dernier, les autorités de Bujumbura et de Kigali avaient défini ces immigrés « clandestins » et avaient décrété leur expulsion du camp de Songore, dans le nord, où ils se trouvaient. Selon les premières informations recueillies par le HCR, les rapatriés ont été conduits dans la ville rwandaise de Butare.

L’agence onusienne exprime sa préoccupation pour le sort de quelque 7.000 Burundais au Rwanda, qui d’après l’accord conclu dimanche entre les deux gouvernements, sont désormais eux aussi considérés comme immigrés irréguliers.



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